mardi 8 mai 2012

Dedalus au festival Musique Action (28ème édition)


15 mai
20:00 - Le Charmois - Vandœuvre

A la découverte du minimalisme musical
Conférence-concert avec la participation du guitariste de l’Ensemble Dedalus 
Didier Aschour et du compositeur américain Tom Johnson.
http://musiqueaction.com/Musique_Action_2012/Ryoanji_2.html

16 mai
12:00 - MJC Lillebonne - Nancy
Parcours Dedalus #1
-TOM JOHNSON : Musique à compter / voix : Vincent Bouchot

17:00 - Médiathèque - Vandœuvre
Parcours Dedalus #2

  1. -ALVIN LUCIER : 947 / flûte : Amélie Berson 
  2. -ALVIN LUCIER : Silver Street Car for the Orchestra / triangle amplifié : Stéphane Garin 

18:00 - Ecole des Beaux-Arts - Nancy
Parcours Dedalus #3
JAMES TENNEY : Beast / contrebasse : Eric Chalan 
  1. -TOM JOHNSON : 32 respirations / clarinette : Fabrice Villard 

17 mai
20:30 - Salle des fêtes - Vandœuvre
Ensemble Dedalus
JAMES TENNEY : Forms
  1. -PHILL NIBLOCK : 2 Lips (aka nameless)
    DEDALUS :  voix : Vincent Bouchot / violon : Silvia Tarozzi / clarinette : Fabrice Villard / saxophone : Pierre-Stéphane Meugé / flûte : Amélie Berson / violoncelle : Deborah Walker / trombone : Thierry Madiot / percussion : Stéphane Garin / contrebasse : Eric Chalan / piano : Denis Chouillet / guitare : Didier Aschour

18 mai
12:00 - MJC Lillebonne - Nancy
Parcours Dedalus #4
  1. -JAMES TENNEY : Cellogram / violoncelle : Deborah Walker 
  2. -CLARENCE BARLOW : Until / guitare : Didier Aschour 

17:00 - Médiathèque - Vandœuvre

Parcours Dedalus #5

  1. -JAMES TENNEY : Saxony / saxophone : Pierre-Stéphane Meugé 
  2. -ALVIN LUCIER : Wind Shadows / trombone : Thierry Madiot 

20:30 - Salle des fêtes - Vandœuvre
Parcours Dedalus #6
  1. -PASCALE CRITON : Circle Process / violon amplifié : Silvia Tarozzi 
  2. -FREDERIC LAGNAUSolar Loops - Bagatelles sans modalité - Les Charmes de la Marche - Ça va son dire / piano : Denis Chouillet

19 mai
20:30 - Salle des fêtes - Vandœuvre

Ensemble Dedalus

TOM JOHNSON : Rational Melodies
  1. -FREDERIC RZEWSKI : Coming Together + Attica
    DEDALUS :  voix : Vincent Bouchot / violon : Silvia Tarozzi / clarinette : Fabrice Villard / saxophone : Pierre-Stéphane Meugé / flûte : Amélie Berson / violoncelle : Deborah Walker / trombone : Thierry Madiot / percussion : Stéphane Garin / contrebasse : Eric Chalan / piano : Denis Chouillet / guitare : Didier Aschour


    Production CCAM- Scène Nationale de Vandoeuvre lès Nancy. Avec le soutien de l'ONDA et de Réseau en Scène Languedoc-Roussillon

vendredi 4 mai 2012

semaine wandelweiser dans mouvement

 Mouvement.net
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COMPTE RENDU
Dans le creux de l’oreille
Semaine Wandelweiser à Paris

date de publication : 03/05/2012 // 8098 signes

Mélomanes avertis et néophytes intrigués ont pu explorer en profondeur la « musique silencieuse » du collectif Wandelweiser (cf. dossier dans Mouvement n°62) grâce à la série de performances, concerts et conférences proposée du 26 au 29 avril à Paris, Montreuil et Vincennes.
En 1952, John Cage donnait naissance à la première pièce musicale uniquement constituée de silence(s) avec 4’33. Une création séminale, à l’origine de tout un courant minimaliste dont émerge en particulier un étrange collectif constitué de compositeurs et d’interprètes, répondant au nom de Wandelweiser.

Si le principe d’utilisation du silence dans la musique est plus répandu qu’il n’y paraît – la conférence de Matthieu Saladin sur une Brève Histoire du Silence  à la bibliothèque-discothèque Robert Desnos  de Montreuil, agrémentée de plus d’une trentaine d’« extraits sonores », parfois plus conceptuels que réellement audibles, citait ainsi les douze pistes de cinq secondes de silence placés au début de leur album Follow The Leader par le groupe néo-métal Korn en 1998 ! –, certains compositeurs et/ou interprètes ont poussé la logique à l’extrême, au point d’en arriver à l’absence presque totale de sons perceptibles.

Fondé en 1992 par le flûtiste néerlandais Antoine Beuger, Wandelweiser – qui fonctionne comme une plateforme de création, de performance et d’édition – appartient à la frange la plus radicale du minimalisme musical. Certains membres parmi les plus actifs du collectif s’étaient donné rendez-vous à Paris du 26 au 29 avril pour une semaine bien particulière, dont la dense programmation avait été conçue par les Instants Chavirés en partenariat étroit avec le compositeur Tom Johnson (instigateur du projet), Mathieu Saladin, Didier Aschour et Jürg Frey. Outre Tom Johnson, Didier Aschour (guitare), Jürg Frey (clarinette) et Antoine Beuger (flûte), l’ensemble Dedalus – émanation instrumentale de Wandelweiser – réunit Cyprien Busolini (violon alto), Thierry Madiot (trombone) et Stéphane Garin (percussions). Samedi 28 avril aux Instants Chavirés, la performance donnée par l’ensemble a permis de révéler l’incroyable potentiel attractif d’une musique jouant de sa force d’évanescence pour s’accorder avec les bruits environnants, les matériaux les plus divers, et, en toute logique, l’espace qui l’entoure et la transporte.


Insidieuse incidence

Pièce d’Eva Maria Houben, La Solennité des silences donne vie à une suite de points d’orgue sonores effilés, entrecoupés de silences, dont les contours semblent progressivement se fondre dans les bruits urbains provenant de l’extérieur. Si sa durée et son intensité progressent par instants, jamais la musique ne cherche la confrontation directe avec son environnement. C’est une quête d’insidieuse incidence, une collision subtile, sans choc ni secousse, qui s’opère.

La pièce suivante, une création d’Antoine Beuger, intensifie ce rapport à l’espace. Ici un texte écrit, distribué au public, entre en jeu, symbole d’une nature musicale confortée par cette écriture rigoureuse. A l’instar de la musique, lentement introduite par de douces touches de vibraphone, les mots, soufflés presque indiciblement par Antoine Beuger, participent d’une sorte de nébuleuse, un halo de respirations, de sons et de paroles presque indistincts, jouant de leur unité sous-jacente pour définir un nouvel espace sonore augmenté.

Un champ de tendresse parsemé d’adieux, la pièce de Jürgen Frey qui conclut cette soirée du 28 avril, creuse le rapport à l’espace au moyen d’une instrumentation plus organique. Chaque musicien, rejoint par Tom Johnson, se dispose dans la pièce, derrière une table garnie de feuilles et de petits cailloux. En respectant scrupuleusement la partition, chaque « instrumentiste » saisit puis fait tomber au sol quelques-uns de ses outils sonores, tout  en créant un filet de sifflements et de voix susurrées. Un souffle continu qui s’étire à l’horizon virtuel des bruits de circulation au dehors, avant que chaque musicien ne quitte la scène, comme pour mieux laisser la vedette au silence qui s’installe.


Beethoven stoned

Ce rapport entre intérieur et extérieur n’est évidemment pas soumis à l’existence d’une frontière. Celle-ci était ainsi totalement abolie, dimanche 29 avril, puisque c’est en plein bois de Vincennes, au pied de la statue inachevée de Beethoven – pied de nez ou symbole ? –, qu’une partie du collectif avait donné rendez-vous au public pour un étrange happening naturaliste. Tout au long de l’après-midi, la fameuse pièce Stones de Christian Wolff, l’ancien comparse d’AMM et de Cornelius Cardew, a été interprétée autour d’un tronc d’arbre mort couché au sol, chacun étant invité à se munir de cailloux pour les frotter dans un geste à la fois collectiviste et distancié. « C’est l’idée, glissait Jürgen Frey entre deux polissages. Tout le monde se réunit ici pour jouer des cailloux, tandis que les autres pièces interviennent ailleurs. » Effectivement, intercalés dans cette pièce en continu, d’autres compositions s’éveillaient au fur et à mesure des déambulations des artistes : un son de mélodica de Jürgen Frey au pied d’un arbre, un souffle de corne de vache plus loin.  Par instants, tout le monde se regroupe. Au pied de l’autel en pierre, centre cosmogonique improvisé de cette matrice musicale improbable, Tom Johnson bat, à intervalles réguliers mais très espacés, le flanc du socle de Beethoven à coups de bâton en bois. A ses côtés, un pipeau chante par instants, pendant qu’une performeuse tourne autour de la statue en traînant des pieds. Un sentiment d’absolu se dégage, une ondulation étrange qui frissonne avec les herbes remuantes et le bruit du vent dans les branches, à peine troublé par l’incrédulité des joggeurs et par la participation plutôt amusante d’un promeneur accompagnant les remueurs de cailloux par le brossage de son chien.

Nulle place n’est pourtant laissée ici au hasard. La pièce Fields Have Ears de Michael Pisaro s’interprète avec feuille de durée et chronomètre sous les yeux, même si les sons utilisés (mini-cymbales, frottements de mains, cithare) s’avèrent plus souvent suggestifs que réellement prégnants. Assis au centre d’un nœud d’arbres, les interprètes semblent jouer physiquement de ce rapport à l’absence, l’œil se substituant à l’oreille, qui garde comme seule accroche la révélation – la prise de conscience ? – du son qui, bien que n’étant pas toujours audible, nous entoure en permanence. Une expérience sonore.


> La semaine Wandelweiser a eu lieu du 26 au 29 avril à Paris, Montreuil et Vincennes.


Crédits photos :
Un champ de tendresse parsemé d’adieux, © Eva Maria Houben. 

Laurent Catala